« Qu’avait-il donc de différent, lorsqu’il se comparait aux autres ? Là-bas, à Plassans, dans sa jeunesse, souvent déjà il s’était questionné. Sa mère Gervaise, il est vrai, l’avait eu très jeune, à quinze ans et demi ; mais il n’arrivait que le second, elle entrait à peine dans sa quatorzième année, lorsqu’elle était accouchée du premier, Claude ; et aucun de ses deux frères, ni Claude, ni Étienne, né plus tard, ne semblait souffrir d’une mère si enfant et d’un père gamin comme elle, ce beau Lantier, dont le mauvais cœur devait coûter à Gervaise tant de larmes. Peut-être aussi ses frères avaient-ils chacun son mal, qu’ils n’avouaient pas, l’aîné surtout qui se dévorait à vouloir être peintre, si rageusement, qu’on le disait à moitié fou de son génie. La famille n’était guère d’aplomb, beaucoup avaient une fêlure. Lui, à certaines heures la sentait bien, cette fêlure héréditaire », Emile Zola, La Bête humaine, 1889
Le lundi 15 janvier 2024, la Conférence du stage des avocats au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation s’est réunie sous la présidence de M. François Molinié, ancien président de l’Ordre, assisté de M. Kevin Graczyk, Mme Flora Drapp, M. Philippe Narcy et M. Luca Bordas, secrétaires.
La question à débattre était la suivante :
« Des descendants d’esclaves peuvent-ils obtenir l’indemnisation d’un préjudice transgénérationnel en lien avec la traite négrière et l’esclavage ? ».
M. Valentin Alavoine et M. Robin Laplace-Claverie, premier et second demandeurs, ont répondu par l’affirmative.
Mme Clémentine Bériard, M. Gabin Stock et Mme Lucille Prigent, premier, deuxième et troisième défendeurs, ont répondu par la négative.
M. Oscard Lardeyret et Mme Caroline Nègre, premier et second ministères publics, se sont prononcés par la négative.
Après le rapport de M. Philippe Narcy, troisième secrétaire, contre lequel M. François Molinié a fait valoir son droit de réponse, qu’il exercera lors d’une prochaine séance, la Conférence s’est prononcée par la négative par 22 voix contre 3, approuvant ainsi la solution consacrée par la Cour de cassation le 5 juillet 2023.
Illustration : Arbre généalogique des Rougon-Macquart annoté par Emile Zola, 1892 – BnF, Manuscrits, NAF 10290, f. 172