« Lorsqu’il s’aperçut donc que Charles avait les pommettes rouges près de sa fille, ce qui signifiait qu’un de ces jours on la lui demanderait en mariage, il rumina d’avance toute l’affaire. Il le trouvait bien un peu gringalet, et ce n’était pas là un gendre comme il l’eût souhaité ; mais on le disait de bonne conduite, économe, fort instruit, et sans doute qu’il ne chicanerait pas trop sur la dot. Or, comme le père Rouault allait être forcé de vendre vingt-deux acres de son bien, qu’il devait beaucoup au maçon, beaucoup au bourrelier, que l’arbre du pressoir était à remettre : — S’il me la demande, se dit-il, je la lui donne. », Gustave Flaubert, Madame Bovary, première partie, chapitre III.
Le lundi 4 décembre 2023, la Conférence du stage des avocats au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation s’est réunie sous la présidence de M. Thomas Lyon-Caen, président de l’Ordre désigné, assisté de M. Kevin Graczyk, Mme Flora Drapp, M. Philippe Narcy et M. Luca Bordas, secrétaires.
La question à débattre était la suivante :
« Le transport de femmes mineures aux fins de conclure des mariages arrangés est-il constitutif du délit de traite des êtres humains incriminé par l’article 225-4-1 du code pénal ? ».
Mme Alizée Dubouchet et M. Emile Lansade, premier et second demandeurs, ont répondu par l’affirmative.
M. Loup Bommier, premier défendeur, a répondu par la négative.
Mme Nadia Belrhomari, premier ministère public, s’est prononcée par l’affirmative. Mme Sophie Debruyne, second ministère public, s’est prononcée par la négative.
La Conférence, après le rapport de M. Philippe Narcy, troisième secrétaire, s’est prononcée par la négative par 19 voix contre 14, approuvant ainsi la solution consacrée par la Cour de cassation le 11 mai 2023.
Illustration : Madame Bovary, moeurs de province, gravure à l’eau forte, Albert Fourié, 1885